Le petit chien futé et la pierre magique

Il était une fois, une forêt du nom d’Onéria. Cette forêt enchantée fut jadis régie par un vieux chêne centenaire, mais le temps était venu pour lui de céder sa place. Alors il rassembla ses amis les plus proches pour transmettre à chacun ses pouvoirs et son savoir. Une fée prénommée Gaïa et vivant à la lisière de la forêt reçut une baguette magique issue de la branche la plus haute du vieux chêne. Son compagnon, Louis fut fait berger et hérita d’un arbre aux fruits magiques. Pour l’aider dans ses tâches, le chêne centenaire lui alloua les services du plus fidèle des animaux d’Onéria : le petit chien futé Sethi. Une autre fée répondant au doux nom de Rose hérita quant à elle du champ de fleurs aux mille couleurs tout proche de sa maison. Elle avait dès son plus jeune âge appris à maitriser la magie des plantes et était devenue experte dans la réalisation de potions.

Par un beau matin ensoleillé alors qu’elle s’adonnait à la préparation une nouvelle potion, elle fut surprise par l’arrivée inattendue de Gaïa et de Sethi. « Bonjour ma chère Rose. J’espère que je ne te dérange pas dans ta préparation. - Oh bonjour Gaïa, je suis en train d’expérimenter une nouvelle potion que j’ai trouvée dans un de mes livres de recette. Que me vaut votre visite ? - Notre arbre magique est tellement chargé de fruits que mon très cher Louis s’est pris l’envie de créer ses premiers élixirs de chance. Veux-tu te joindre à nous ce soir pour tester leur efficacité ? - Avec le plus grand plaisir, répondit Rose. Si tu le veux bien je ramènerai les desserts. »

Satisfaits par la réponse de leur amie, Gaïa et Sethi prirent le chemin du retour. Mais au lieu de passer par le chemin habituel, Sethi décida d’emprunter un terrain boueux. « J’espère qu’il ne va pas arriver avant moi, s’inquiéta Gaïa. Le connaissant, ma maison sera tapissée de traces de pattes à mon retour. » Ce que pressentit Gaïa arriva. La maison d’habitude si propre et si ordonnée était une véritable porcherie. Furieuse, elle brandit sa baguette magique prête à transformer Sethi en goret, mais elle reprit très vite ses esprits. « Allez ouste, dehors ! S’énerva Gaïa. Va faire une très longue promenade. Et surtout ne reviens pas avant le coucher du soleil ! Je vais devoir sortir mes balais pour nettoyer et frotter toutes les traces que tu as laissées du sol au plafond. »

Alors, Sethi entreprit une très longue balade. Il s’aventura dans la forêt, longea le lac salé, fit hommage au passage au vieux chêne mort puis remonta une petite rivière. Il se hasarda tellement loin qu’il pénétra dans un étrange et curieux royaume où il n’avait jamais posé les pattes: le royaume de Petrosa. Il y découvrit des rues grisâtres pour atteindre finalement un château qui ne semblait guère des plus accueillants. Pire que tout, l’entrée du château était interdite aux petits chiens futés. « C’est vraiment le plus triste des royaumes que j’ai vu de toute ma vie de chien ! Mais où sont donc passées les couleurs ? »

Une vieille pierre terne qui semblait être là depuis la nuit des temps lui répondit : « C’est de ma faute, ou plutôt celle de la vilaine sorcière Miranda. Ma magie s’est éteinte au moment où les gens ont oublié mon existence. » Interpellé par la réponse de la vieille pierre magique, Sethi s’assit et écouta sagement. « Je suis la vieille pierre magique détentrice des couleurs de ce royaume. Le jour je puise mes pouvoirs par la joie des habitants, la nuit je les puise dans la lumière de la lune et des étoiles. - Oh Comme ce devait être beau, songea Sethi. -Oui, répondit la vieille pierre magique. Les peintres venaient des contrées les plus lointaines pour puiser les couleurs resplendissantes de ce charmant royaume. »

« La sorcière Miranda jalouse de la joie et de la beauté insolente des couleurs chercha par tous les moyens à répandre la tristesse dans le royaume. Elle commença par me priver d’une partie de mes pouvoirs en dérobant la lune et les étoiles.

« C’est quand même étrange, s’interrogea Sethi. On ne peut pas partir bien loin avec la lune dans les bras. Elle l’a surement cachée dans le royaume. » Alors la vieille pierre eut alors un éclair de lumière : Miranda aurait-elle transformé la lune à l’état d’une pierre pour que l’on ne puisse la trouver? Après un profond soupir elle poursuivit la suite de son histoire.

« Pour répandre la tristesse et la désolation dans le royaume, Miranda déclencha une pluie diluvienne. Il plut pendant trois jours et trois nuits tant et si bien que notre petite rivière d’habitude si calme et reposante sortit de son lit et inonda tous les commerces et les maisons. Les habitants étaient tellement tristes de ne plus pouvoir habiter dans leurs maisons qu’ils en perdirent l’espoir et ainsi leurs couleurs. -Mais pourquoi n’ont-ils pas fait appel à tes pouvoirs, demanda Sethi ? -Hélas ! Quand on a tout perdu, on ne croit plus en rien et surtout pas en la magie, expliqua la vieille pierre. -C’est vraiment dommage, s’attrista Sethi, mais rassure toi vieille pierre magique, mes amis et moi pouvons vous aider. Nous possédons d’incroyables pouvoirs. - Comme j’aimerai y croire petit chien ! Mais si les habitants ne croient plus à ma magie comment pourront-ils croire à la vôtre ? »

A cette affirmation le petit chien ne trouva aucune réponse. Il reprit la direction de la forêt d’Onéria. « Peut-être que mes amis trouveront une réponse pour rompre le maléfice, espéra Sethi. » A son arrivée il retrouva les fées et le berger Louis attablés savourant les succulents macarons de Rose . Tout en sirotant l’élixir de chance, ils écoutèrent le récit de Sethi. « Ton histoire est émouvante, dit Louis. Cependant si les habitants de Petrosa ne croient plus à la magie, nous ne pouvons pas être d’un grand secours. » Alors la fée Gaïa se leva et se dirigea vers la bibliothèque à la recherche du plus vieux grimoire. Elle parcourut le livre et fit une étrange découverte. « Ecoutez mes amis : » La magie existe et existera toujours tant que l’innocence rayonnera dans les cœurs des enfants.

« Les enfants, s’étonnèrent t-ils tous en cœur ! » Tout devenait clair pour le petit chien futé. Si les enfants croyaient de nouveau à la magie alors le royaume de Petrosa serait sauvé. Sethi était tellement excité d’apprendre cette nouvelle qu’il engloutit les derniers macarons répandant des miettes sur le parquet et but le reste d’élixir de chance. « Mes macarons, s’écria Rose ! - Mon parquet tout propre que j’avais lavé cet après-midi ! S’énerva Gaïa. - Tu as bu tout l’élixir de chance sans le partager avec moi, déplora Louis. » Sethi expliqua sa découverte. Il commença à rappeler à chacun les incroyables pouvoirs qu’ils avaient hérités du vieux chêne centenaire et leur expliqua son plan. « Mais, où peut-on trouver des enfants, s’interrogea Rose ? - A l’école bien sûr, répondirent les autres. »

Et c’est ainsi que le jour suivant, Sethi se rendit à l’école centrale accompagné de son fidèle ami. Louis, les bras chargés de fruits provenant de son arbre magique. Les enfants furent émerveillés de voir pour la première fois des personnes aux couleurs chatoyantes. Rassemblés dans la salle de classe, ils écoutèrent avec attention les paroles du petit chien. « Mes amis, déclara Sethi. Nous sommes ravis de faire votre connaissance. Ce jour est un grand jour pour vous. Vous n’aurez plus jamais peur de la nuit car la lune et les étoiles rayonneront de nouveau dans votre royaume. » Les enfants plutôt surpris comprirent aussitôt qu’ils devaient retrouver la lune. Mais cette tâche leur sembla décourageante tant le royaume était immense. « Nous n’y arriverons pas, interrompit un élève. Petrosa est tellement grand qu’il nous faudra des semaines pour y arriver. » Alors Louis rassura les enfants : « Les enfants, la magie va vous aider dans cette quête. Croquez mes fruits et la chance vous sourira. »

Après avoir goûté les fruits juteux et succulents, les enfants ressentirent une forte chaleur se propager dans leurs ventres puis dans tout leurs corps. Comme poussé par une force invisible, ils décidèrent de commencer leur recherche en visitant le parc du château. Cachée entre deux rochers la lune et les étoiles se mirent à scintiller à leur arrivée. Les enfants en restèrent bouche bée.

« La magie existe, s’exclamèrent les enfants ! Nous avons retrouvé la lune et les étoiles » Les enfants rapportèrent la pierre de lune à l’école et comme par enchantement la pierre de lune disparut de leur main pour faire place à un beau ciel étoilé. Ils purent contempler pour la première fois de leurs vies cet incroyable spectacle. Remplis de joie et d’espoir, Ils allèrent annoncer la nouvelle à leurs parents et aux autres camarades des autres écoles. De son côté Sethi, si fier de l’exploit des enfants, décida de passer à l’étape suivante : redonner au royaume ses couleurs d’origine.

Et c’est ainsi que le deuxième jour, le petit chien Sethi se rendit à l’école située au Nord du royaume accompagné de Rose, les bras chargés de fleurs aux couleurs éclatantes. A leur arrivée, les enfants accueillirent nos amis chaleureusement. Pour la première fois de leur vie, ils allaient créer des potions de couleurs. Chacun se mit à sa tâche. Pendant que Rose surveillait son chaudron, les enfants peignirent les bords de la rivière. Mais la tâche était trop dure pour Rose. Elle ne disposait pas suffisamment de fleurs pour colorer tout le royaume. A cet instant la fée Gaïa apparut. Elle avait dans ses bras un vieux grimoire. Elle lut à tous un paragraphe du vieux livre. « Quand l’animal domestique après grandes peines viendra parler. L’or et l’espoir associés libéreront les couleurs abandonnées. »

Sethi n’en crut pas ses yeux : ce vieux grimoire parlait de lui. Hélas la fée Gaïa était aussi porteuse d’une mauvaise nouvelle. Ses recherches étaient infructueuses car il n’y avait point d’or dans le royaume. « Peut-être est-il temps pour toi de faire usage de ta magie, suggéra Gaïa ? Sans cet or, le maléfice ne pourra être rompu. » Alors Sethi prit une grande inspiration et prononça sa formule magique : « Rusé comme un renard, futé comme un chien. Qu’un simple regard montrera le chemin. » Puis il observa autour de lui. Devant lui, un homme assis sur un banc feuilletait le journal des royaumes. Il s’approcha timidement et lut la dernière page. C’était la page des sports et des dates des prochains championnats. -De quoi sont faites les médailles des champions, s’interrogea Sethi ? -Elles sont faites à partir de l’or le plus pur, répondit Gaïa.

Ainsi le lendemain matin, le petit chien Sethi se rendit dans l’école située au sud du royaume. Il était accompagné de la fée Gaïa. Elle avait dans la main sa baguette magique. « Mes chers amis, déclara Sethi. Ce jour est un grand jour pour vous. Il est grand temps de rompre le sort qui s’abat sur Petrosa. Pour cela, nous allons vous aider à vous surpasser et décrocher le plus de médailles d’or possibles. » Aussitôt, Gaïa brandit sa baguette magique et prononça une incantation d’encouragement. « Par le pouvoir de la magie, tes rêves seront accomplis. Travail et efficacité seront les clés de ton succès. Et quand tu seras le meilleur, de l’or couvrira ton cœur. » A la sortie des classes, les parents n’en crurent pas leurs yeux. Leurs enfants portaient autour de leurs cous des médailles d’or aussi grosses que leurs petits cœurs.

- Ce n’est pas possible! C’est incroyable! Comment avez-vous réalisé cela? S’interrogea un parent. - C’est grâce à la magie. Répondit fièrement l’enfant. La magie existe toujours dans notre royaume. Il faut juste y croire. A ces mots, les médailles se mirent à briller telles des petites étoiles. - Mais c’est de la magie ! Se dit surpris un parent. Alors elle est toujours là ! Les parents comprirent que sans leur action la magie ne pouvait fonctionner. Et dans un bref soupir, ils annoncèrent de tout leur cœur que la magie existait dans le royaume. Aussitôt, la vieille pierre se réveilla. Elle se mit à briller de plus en plus fort. Les parents et les enfants furent vite éblouis et fermèrent les yeux. Lorsqu’ils les ouvrirent. Petrosa avait retrouvé ses couleurs. La nouvelle circula rapidement dans les contrées lointaines. Les artistes revinrent de nouveau à Petrosa. Pour remercier nos amis de la forêt d’Onéria, les parents et les enfants décidèrent de rendre hommage à la pierre. Et c’est ainsi que la pierre magique de Petrosa, fut entourée de fleurs de couleurs resplendissantes mais nul connaissait leur provenance. Sauf les enfants qui en avaient une idée.