Une tendre amitié Vol.2

L’approche de Noël Plusieurs semaines s’écoulèrent pendant lesquelles les deux enfants trouvaient une réelle amitié ; ni l’un ni l’autre ne se lassait de leur cause respective ; Bérangère se rendait toujours allègrement chez son compagnon de jeu, acceptant aisément un certain rôle de distraction et de réconfort moral dont il avait si besoin. Parfois, elle emmenait Grégoire, son petit frère. Ce dernier amusait tellement Tanguy, il l’aidait un peu à oublier la séparation d’avec sa petite sœur Chloé. Tanguy ne parla pas de la venue récente du médecin et Bérangère n’osait rien lui demander de plus au sujet de son état. Noël approchait.

Les enfants n’attendirent pas les derniers jours de l’année pour décorer leurs sapins. Dès le début du mois de décembre, Bérangère persuada ses parents d’acquérir un sapin en pot, lequel resterait vert et n’aurait pas l’inconvénient de perdre ses aiguilles ni de les laisser joncher sur le sol en séchant. De son côté, Tanguy avait su convaincre Marthe d’acheter au village l’arbre de Noël, une douzaine de boules aussi colorées les unes que les autres mais dans des tons différents y compris argenté, plusieurs petits sujets à suspendre, une grande étoile à poser au sommet et des guirlandes scintillantes pour un effet à la fois traditionnel et majestueux.

Marthe ne toucha pas à la décoration, ce furent les enfants qui habillèrent de fête le conifère, Tanguy passant les éléments de décor à Bérangère et lui suggérant leur emplacement. Le sapin, une fois prêt à affronter Noël et le Nouvel An dans son plus bel apparat, faisait l’admiration des deux enfants qui le contemplèrent pendant près d’une heure en commentant les souvenirs que chacun gardait des Noëls précédents.

La veille des vacances, comme tous les ans, les enfants des deux écoles du village furent conviés à une fête réunissant toutes les classes. Les petits de la maternelle recevaient un jouet du Père Noël en personne et assistaient à un goûter en compagnie des parents présents. Les « grands » du primaire organisaient un véritable spectacle composé de poèmes et de sketches, au terme duquel chacun se régalait des friandises offertes. C’était toujours une véritable distraction, et pourtant cette année, Bérangère gardait le cœur gros et n’arrivait pas à se réjouir complètement comme ses camarades. Elle pensait à Tanguy, sans cesse immobilisé chez lui.

Mais les deux enfants sauraient pallier ce manque à la moindre occasion en dégustant des friandises que Bérangère apporterait chez Tanguy. Ce fut rapidement chose faite. La fillette savait pertinemment émouvoir sa maman. Elle réussit à obtenir une grande boîte de chocolats fins et de pâtes de fruits pour un super goûter avec le jeune garçon. L’on peut facilement imaginer qu’ils n’eurent pas de peine à se délecter, ainsi que Marthe, qui ne put, une fois de plus, résister à la tentation de « tester » la qualité et la saveur des produits.

Noël approchait à grands pas et les quelques boutiques que comptait le village étincelaient de « mille » guirlandes rayonnantes comme une multitude de soleils. Chacun des deux enfants conservait l’idée de faire un beau cadeau de fin d’année à son ami respectif, Tanguy ayant fait part de son intention à Marthe, et Bérangère à ses parents ; mais ni l’un ni l’autre ne voulait en parler, se réservant ainsi une mutuelle surprise.

En famille Tanguy venait de recevoir des nouvelles de sa famille. Celle-ci annonçait son imminent départ en vacances pour le petit village méditerranéen devenu familier au garçon. Il y demeurait à présent depuis plus de trois mois. Il réussissait difficilement à contenir sa joie à l’idée qu’il allait très bientôt revoir ses parents, bien sûr, mais surtout sa petite sœur, cette dernière étant certainement la personne dont il se languissait le plus. Il se disait aussi qu’après leur arrivée, il demanderait à ses parents la permission d’inviter les parents de Bérangère au repas de Noël, et il espérait de tout cœur que les deux familles seraient d’accord.

Trois jours plus tard, une voiture s’arrêta devant la demeure. Tanguy se dirigea vers la fenêtre. « Marthe, Marthe ! s’exclama-t-il, ils sont là, ils arrivent. ˗ Ne sois pas si nerveux, répondit-elle, je vais à leur rencontre. » L’enfant sursautait à chaque pas qui retentissait dans l’escalier.

« Chloé ! viens vite m’embrasser », cria-t-il, en voyant la fillette monter les dernières marches. Lorsque leurs parents arrivèrent à l’étage, les deux enfants étaient encore tendrement enlacés. « Garde-nous quelques étreintes ! » lui dit avec taquinerie sa maman tout en se précipitant dans ses bras. Le papa s’approcha à son tour pour embrasser son fils. Tous étaient heureux de se retrouver. Evidemment, Chloé ne tarda pas à énoncer à son frère tout ce que le Père Noël devait lui apporter si ses souhaits étaient exaucés.

« Tout se passe-t-il bien ici ? interrogea le père. ˗ Sans problème, répondit Marthe, tout le monde au village est très gentil, et Tanguy a trouvé une sympathique camarade qui vient lui rendre visite aussi souvent qu’elle le peut. ˗ Ah bon ! fit le père, et comment se prénomme cette petite conquête ? questionna-t-il en souriant à Tanguy. ˗ Bérangère, papa. ˗ C’est un charmant prénom ; nous aurons certainement l’occasion de la rencontrer durant notre séjour, n’est-ce pas ?

˗ Oui, papa… à ce propos, Marthe et moi désirions vous demander si, maman et toi, seriez d’accord pour bien vouloir faire venir Bérangère et sa famille pour le repas de Noël ? ˗ Hé là ! tu vas bien vite ! laisse-nous d’abord arriver et nous installer ; nous en reparlerons plus tard à tête reposée car le trajet a été long et éreintant ; mais à priori, pour ma part, je n’y vois pas d’inconvénient, si toutefois la famille de ta copine n’est pas trop nombreuse, dit-il ironiquement. ˗ Oh non papa ! Bérangère, ses parents et son petit frère. ˗ Bien, nous en reparlerons » répéta-t-il pour conclure et pouvoir enchaîner sur les nouvelles fraîches. Le soir, au repas, le garçon orienta à nouveau la conversation sur ce sujet, trop impatient de la réponse qu’il attendait, espérant une affirmation pour l’annoncer à son amie.

« Qu’en penses-tu, chérie ? dit le père en se tournant vers son épouse, et vous Marthe ? poursuivit-il, êtes-vous prête à affronter les préparatifs qu’entraîne un repas de fête pour plusieurs personnes ? » La maman marqua une approbation, fixant le visage de son fils qui semblait nourrir tout son espoir dans le fait que cette réunion de convives ait lieu ; quant à Marthe, elle était prête à faire n’importe quel extra pour le bonheur de Tanguy et l’exprima d’un air enjoué. « Eh bien ! tu vois, aucun problème, tu verras avec Bérangère pour l’heure du repas, si toutefois ses parents sont eux aussi d’accord. ˗ Merci papa et maman ! » s’exclama l’enfant, leur tendant les bras pour qu’ils viennent l’embrasser. Le lendemain, Bérangère fut ravie d’apprendre la bonne nouvelle en venant rendre visite à son ami.

Enfin Noël ! Tanguy et sa famille célébrèrent la veillée de Noël par un agréable petit réveillon qui s’acheva sur une distribution de cadeaux. Tout le monde fut très comblé, y compris Marthe. Chloé, qui s'était endormie dans la soirée, fut réveillée pour prendre les paquets déposés par le Père Noël devant l’arbre. Tout ce qu’elle avait demandé était bien là, commandé par toute la famille : jeu de karaoké, coiffeuse et son nécessaire, jeu de société, jeu vidéo et livres. De son côté, Tanguy ne savait pas, avant de défaire les présents, ce que lui avait réservé ce vieux bonhomme en rouge qui comble de joie les enfants une fois par an ; c’est ainsi qu’il découvrit au fur et à mesure une encyclopédie sur la nature, un jeu du solitaire, un magnifique stylo-plume, et n’en croyant pas ses yeux, il finit par le déballage d’un… ordinateur portable.

La maman reçut notamment de son mari des livres et une magnifique tenue d’intérieur faite de soierie. Le papa reçut à son tour, entre autre, un superbe guide itinéraire relié comportant les plus intéressantes adresses d’hôtels, restaurants et lieux de visites qu’ils pourraient être amenés à fréquenter ensemble lors de leurs nombreux déplacements. Marthe sortit d’une grande boîte toute une gamme d’accessoires assortis pour lui simplifier la vie dans la maison. Pendant ce temps, chez Bérangère, la fête battait également son plein et les enfants obtinrent tous les jeux et jouets souhaités. Grégoire fut réveillé pour l’occasion et ne lâchait plus le singe en peluche qu’il avait découvert au milieu de ses cadeaux. La fillette, elle, avait déjà commencé à répondre à certaines questions posées par son jeu tant attendu.

Plus tard dans la soirée, dans la vieille demeure de pierre rose, toute la maisonnée partit se coucher. Marthe décida qu’elle se lèverait très tôt le lendemain pour ranger le salon et la salle à manger, et préparer un nouveau repas afin que tout soit prêt pour accueillir les invités. C’est sur cette pensée de la prochaine venue des convives que Tanguy s’endormit.

Lorsqu’il se réveilla, tout le monde dans la maison était déjà levé, Chloé la première, trop pressée d’essayer ses nouveaux jeux et jouets. Marthe vint, comme tous les matins, aider le garçon à se préparer pour la journée. Il avait choisi pour l’occasion ses plus beaux vêtements. Vers midi, un coup de sonnerie retentit dans la demeure. Bérangère arrivait un paquet sous le bras, accompagnée de Grégoire et de ses parents qui avaient acheté pour dessert, comme le veut la coutume le jour de Noël, bûche et champagne.

Les présentations se firent dans une bonne ambiance, chacun satisfait de faire de nouvelles connaissances. Celles-ci terminées, Bérangère s’empressa d’offrir à son ami le cadeau qu’elle avait réussi à garder secret pendant plusieurs jours. Celui-ci le déballa avec tellement d’empressement qu’il déchira le papier cadeau dans tous les sens. A sa surprise, il découvrit une magnifique lunette digne d’un futur astronome. « Oh, merci, c’est beaucoup trop ! s’exclama-t-il en tendant les bras vers la fillette. ˗ Non, penses-tu ! Tu pourras observer le ciel de ton balcon tous les soirs, répondit-elle. ˗ Attends ! fit-il, car moi aussi j’ai pensé à toi. »

Il se dirigea à l’aide de son fauteuil vers un guéridon, prit à son tour le paquet qu’il avait posé là quelques instants plus tôt, et le tendit en direction de la petite fille qui montra autant d’impatience que lui, juste avant, de savoir ce qu’il contenait. Elle sortit de l’emballage une mallette et l’ouvrant, trouva, émerveillée, un somptueux matériel de dessin pour imaginer et créer, tels les pros, n’importe quel ouvrage sur de très nombreux thèmes et sur plusieurs supports. Ils ne purent évidemment pas s’empêcher de s’embrasser à nouveau après des remerciements renouvelés.

Tous, sans exception, apprécièrent les mets succulents que Marthe avait savamment su préparer, épaulée durant toute la matinée par le restant de la maisonnée. Chacun, pour l’occasion, s’était efforcé à sa façon de l’aider, afin de lui éviter trop de labeur en ce jour si particulier. Les deux familles restèrent ensemble l’après-midi, discutant auprès du feu, et se séparèrent le soir venu en espérant se revoir très prochainement.

Meilleurs voeux Une semaine plus tard, le réveillon de la Saint-Sylvestre promettait d’être des plus joyeux. En effet, Monsieur DANIEL, le père de Tanguy avait exceptionnellement obtenu, en cette période de fête, de prolonger ses vacances de quelques jours. Il ne devait, de ce fait, nullement partir avant le début du mois de janvier. Tous ne purent que s’en réjouir, et ce fut, à leur tour, les parents de Bérangère qui convièrent la famille de Tanguy à cette dernière soirée de l’année. Ce fut chose acceptée sans détour. Marthe et Tanguy furent déposés les premiers à la jolie villa habitée par la petite fille et ses parents. Marthe avait convaincu Madame ROLLAND et son mari, les parents de Bérangère, de se laisser aider pour la préparation du menu et des festivités.

Plus tard dans la soirée, les deux familles étaient réunies autour d’une table plus qu’appétissante, garnie de crustacés et foie gras, comme souvent dans les réveillons, ainsi que de volaille accompagnée de légumes variés. Puis les cotillons furent à l’honneur. Petits et grands, chapeau de carton sur la tête et sifflet à la bouche, lancèrent tant de serpentins que ceux-ci envahirent le séjour en un clin d’œil. A minuit, bises et vœux se mêlèrent à la fête, et chacun prit de bonnes résolutions pour cette nouvelle année qui venait tout juste de commencer.

Vers trois heures du matin, lorsque le calme fut revenu et que le champagne eut complètement cessé de courir dans les coupes des adultes, les deux familles décidèrent de se séparer. Chloé avait d’ailleurs été installée dans la chambre du petit Grégoire depuis plus de deux heures, les deux jeunes enfants ayant sombré dans un profond sommeil. Les parents de Tanguy devaient regagner leur domicile parisien deux jours plus tard, et c’est avec le cœur un peu gros de ne pouvoir prolonger ces fêtes avec leur fils, que la séparation eut lieu.

Fin

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